Pour sa 25e édition, le festival est en bonne voie pour afficher à nouveau « complet ». Luc Barruet, son fondateur, nous livre son analyse du phénomène Solidays et revient sur quelques souvenirs croustillants.
QUELQUES MOTS SUR VOUS POUR COMMENCER ?
Je suis un utopiste pragmatique dont la principale mission est de créer et faire vivre des dynamiques individuelles ou collectives profitables à toutes et tous. Ce n’est pas toujours facile mais c’est passionnant. Créer Solidarité Sida et le festival Solidays aura été une aventure humaine exceptionnelle. Elle m’a fait grandir et permis de répondre à ma « quête de sens » avant qu’elle ne s’impose à moi.
QUE REPRÉSENTE LE FESTIVAL SOLIDAYS À VOS YEUX?
Un formidable outil contre la détresse humaine et une jolie tribune pour le mieux vivre ensemble. En créant du lien social et du sens collectif, en nourrissant les esprits et en éveillant les consciences, Solidays rapproche les gens et fait naître des milliers de vocations sociales ou solidaires chez les jeunes. En ce sens, il réenchante le monde avec succès. C’est vraiment un événement d’intérêt public, hors norme et singulier. Pour avoir mené des recherches, il n’a pas d’équivalent.
QU’EST-CE QUI CONTRIBUE À SON SUCCÈS SELON VOUS ?
Il n’y a pas une raison mais plusieurs. Le prix modéré́ des billets, l’enthousiasme des bénévoles, la qualité de la programmation et l’ambiance singulière du festival. Nombreux sont les gens qui considèrent ce festival comme un lieu de pèlerinage. On y vient en famille ou entre amis pour partager le plaisir « d’être utile » ou le plaisir « d’être ensemble ». Et comme chaque année le charme opère, on y revient le cœur léger et le sourire aux lèvres. En interne, on appelle ça la « mécanique du cœur ».
LA MUSIQUE COMME MOTEUR DE SOLIDARITÉ. D’OÙ VOUS EST VENUE CETTE IDÉE ?
La musique avec son pouvoir fédérateur a toujours été un formidable vecteur d’émotion collective. Encore plus, quand elle supporte une cause ou un combat comme le sida. Nous n’avons donc rien inventé. Notre principal mérite aura été de lui fournir un nouvel écrin avec le festival Solidays.
LE FESTIVAL A FAIT DU CHEMIN DEPUIS SA CRÉATION. QUEL REGARD PORTEZ-VOUS À LA VEILLE DE CETTE 25e ÉDITION ?
Un regard ému. Vraiment. C’est assez dingue de se dire que Solidays est aujourd’hui un événement initiatique pour bien des jeunes. Une sorte de passage obligé vers un monde plus juste et solidaire que beaucoup appellent de leurs vœux. Il n’est pas étonnant que chaque année, des milliers de vocations solidaires naissent dans les allées de Longchamp.
Un regard inquiet aussi. Depuis le COVID-19, nos prestataires fidèles ne peuvent plus consentir les mêmes efforts. Résultat, les frais de production ont considérablement augmenté. Sans nouveaux soutiens ou mécènes, j’ai peur que l’avenir du festival soit semé d’embuches…
À CE POINT-LÀ ?
Oui. Le plus dur n’aura pas été de créer Solidays mais de l’inscrire dans la durée et de le renouveler. Chaque année, nous repartons d’une feuille blanche pour préparer la prochaine édition. Et force est de constater que les deux dernières ont été très difficiles à organiser. La prochaine le sera encore plus avec les très nombreuses incidences (négatives) que nous posent l’organisation des Jeux 2024. Je ne voudrais pas que l’incroyable succès populaire du festival masque ces dures réalités. Plus que jamais, nous allons avoir besoin de nouvelles ressources.
UN MEILLEUR SOUVENIR À PARTAGER ?
Plusieurs me viennent à l’esprit. Le Die-in géant dans la boue en solidarité avec les activistes sida qui manifestaient au même moment à Bangkok pour réclamer des traitements (2004), la patrouille de France dans le ciel de Solidays (2019), le concert de Manu Chao en clôture après 10 ans d’attente (2009), 65 000 festivaliers qui quittent le festival en chantant « Ce n’est qu’un au revoir » (2014), Bill Gates au Social Club (2015), l’enthousiasme généreux des 12 000 soignants invités à l’édition spéciale qui leur rendait hommage (2021), Kad Merad, Roshdy Zem, Léa Salamé venant prêter main forte aux bénévoles de Solidarité Sida à la boutique Solidays (2022). Il y en a tellement…
UN RÊVE AUSSI ?
J’espère qu’un jour Solidays pourra s’appeler Jolidays. Ça voudra dire qu’un vaccin contre le sida aura été découvert et que toutes celles et ceux qui en ont besoin, y auront accès.