Laura a découvert la façon d’aborder la sexualité de Solidarité Sida en étant bénévole sur l’expo Sex In The City à Solidays. Parce que cette démarche m’a conquise, elle est devenue bénévole Prévention pendant 5 ans. Cela l’a inspirée pour créer son association. Aujourd’hui, c’est à son tour de former les bénévoles Prévention. Laura nous raconte son engagement et son parcours.

Bonjour Laura, peux-tu te présenter rapidement ?

Je suis Laura Cherfi, j’ai 28 ans et je travaille autour de questions d’empowerment avec un axe particulier sur les sexualités et l’estime de soi.

Comment l’aventure à Solidarité Sida a commencé pour toi ?

Je me suis engagée en 2012 comme bénévole pour Solidays en demandant à être sur l’expo Sex In The City. J’étais déjà très intéressée par les questions de sexualité positive et l’initiative de ce parcours me paraissait totalement intégrer cette idée de vision globale de la sexualité, plutôt que de parler uniquement des risques en disant « c’est dangereux de ne pas mettre de capotes ». J’ai eu un gros coup de cœur et au mois d’août quand il y a eu l’appel à candidatures pour rejoindre l’équipe des bénévoles Prévention, je me suis précipitée pour y répondre, j’ai été prise et j’y suis restée 5 ans. J’étais en dernière année d’école de commerce, je m’intéressais beaucoup aux questions d’entreprenariat social, je savais que j’avais envie de creuser la question des sexualités, mais je ne savais pas exactement comment. En intégrant l’équipe Prévention, en rencontrant des gens sur le terrain, en ayant des formations, et en faisant par ailleurs de la vente à domicile de sextoys, j’ai pu voir où les gens de ma génération avaient des problématiques en termes de sexualité. Je me suis rendue compte que nous avions comme héritage « le sexe, c’est honteux et sale » et qu’à cela se rajoutait pour ma génération « le sexe, c’est dangereux ». Qu’il y ait plein d’initiatives autour des sexualités mais qu’il y avait très peu d’approches positives. Pour moi c’est comme le journalisme et le journalisme de solutions : le premier va dépeindre des problématiques avec une analyse très intéressante et le second va aller à l’étape d’après en montrant les possibilités, les ouvertures.

Être bénévole Prévention a donc été une source d’inspiration pour toi ?

Tout à fait puisque nous avons créé Les Chahuteuses en 2014. Il s’agit d’une association pour des sexualités joyeuses qui intègre les problématiques relationnelles et autres. Nous organisons des événements assez variés à Paris. Nous faisons de l’éducation sexuelle pour adultes dans un format ludique et pédagogique. Dans « Les Chahuteuses », je développe vraiment l’axe sexualité et en coaching, je laisse les choses plus ouvertes et je laisse les gens venir vers moi. J’ai une thématique assez centrale dans mon histoire et dans mon parcours avec la sexualité qui est la question de l’estime de soi. Je travaille de plus en plus sur les liens entre sexualité et estime de soi. L’estime de soi, c’est le fait de s’accorder suffisamment de valeur et d’avoir suffisamment confiance dans ses capacités pour pouvoir faire face aux défis de la vie. Or aujourd’hui, la sexualité est vraiment un défi pour de nombreuses personnes. Nous avons eu tellement peu d’éducation sexuelle, nous avons un héritage tellement lourd en termes de tabous que les personnes qui souhaiteraient aller vers une sexualité plus joyeuse doivent faire un travail sur l’estime de soi, que ce soit dans l’espace dans la sexualité, mais surtout dans l’espace des relations et dans la capacité à s’exprimer. Nous retrouvons des demandes en coaching personnel très similaires car la sexualité est finalement un domaine de vie comme les autres, un peu plus challengeant parce qu’il y a beaucoup de tabous autour mais au final, ce sont toujours les questions d’estime de soi qui reviennent.

Concrètement, à quoi ressemblent ces événements ?

Nous proposons des ateliers, des cafés, des conférences. L’idée est de libérer la parole autour des sexualités et surtout de montrer leur diversité. De la même façon que chaque personne a une expérience de vie différente, des aspirations professionnelles ou familiales différentes, en matière de sexualité, c’est la même chose. L’idée est de sortir des cadres qui nous poussent à la performance, à la normalisation des corps et d’affirmer que nous sommes différents et que c’est une richesse car chacun.e peut trouver son épanouissement et rencontrer des personnes qui lui conviennent.

Quel est le profil des personnes qui assistent aux événements que tu proposes ?

Nous avons un public très mixte et paritaire. Les personnes ont entre 25 et 40 ans avec une moyenne d’âge autour de la trentaine. Nous avons des personnes de toutes orientations sexuelles, qui se situent différemment sur les questions de genre, avec des métiers très différents. Pour le moment, nous avons assez peu de mixité culturelle, nous travaillons beaucoup cette notion d’inclusivité, c’est notre challenge.

Alors que sur les actions que tu menais en tant que bénévole Prévention, c’était toi qui « allais vers », sur tes événements les gens ont une démarche pro-active, cela fait une différence ?

Nous avons deux axes : des ateliers sur Paris, mais également des ateliers sur des festivals, et là c’est très intéressant pour nous car nous intervenons auprès d’un public qui n’est pas forcément venu spécifiquement pour entendre parler de sexualité mais qui a quand même passé la porte de l’atelier par curiosité. Nous nous apercevons que nous aimons l’impact que nous avons dans ces moments-là pour les mêmes raisons que l’équipe Prévention va à l’extérieur.

Et tu formes donc désormais les bénévoles Prévention ?

En développant « Les Chahuteuses », nous cherchions des outils qui permettraient à chacun.e avec ses expériences très variées de trouver des pistes et des réponses. En me formant au coaching, j’ai découvert des outils géniaux d’accompagnement et j’ai voulu les partager avec les bénévoles Prévention. La formation consiste à leur expliquer que nous ne sommes pas juste là pour que les gens mettent des préservatifs, mais pour qu’ils ressortent avec une vision des sexualités détendue, libre, ouverte et pour leur permettre de créer un espace dans lesquels il font leurs propres choix avec leurs valeurs, amour, respect et jeu. En effet, quand on évolue dans une vision de la sexualité libre et joyeuse, il devient beaucoup plus facile de faire face aux risques et d’aborder la question du préservatif, de la contraception, des IST etc.

Qu’est-ce que cela te fait de former tes anciens « collègues » ?

J’ai arrêté d’être bénévole Prévention en juin 2017. Je ne connais pas encore les nouvelles recrues, mais le fonctionnement de l’équipe est très horizontal, basé sur l’échange de savoirs, sur l’idée que chacun a à apporter des choses aux autres. Cela me paraît donc tout à fait normal, de la même manière que les premières années, j’ai beaucoup appris des anciens qui m’ont transmis beaucoup de choses de manière certes, plus informelle. Cela me fait très plaisir de pouvoir redistribuer. J’ai fait mes premières armes à Solidarité Sida et c’est génial pour moi de pouvoir faire profiter du parcours que j’ai fait ces cinq dernières années et de pouvoir leur transmettre les outils que j’ai mis du temps à trouver.

Et alors, l’année prochaine, Les Chahuteuses seront au Village Solidarité à Solidays ?

Si nous en avons la possibilité, ce sera avec grand plaisir car je pense que cela plairait beaucoup à l’équipe.