Il est consultant en santé sexuelle et membre du Comité France. Il nous raconte son parcours, son engagement et son rôle dans ce comité.
Bonjour Stephen, peux-tu te présenter rapidement ?
Je m’appelle Stephen Karon, j’ai 37 ans, je suis gay et vis actuellement à Bruxelles où je développe une activité de consultant sur les questions de santé sexuelle, d’usage de drogues, de réduction des risques et d’approches communautaires. Je fais à la fois de la formation et de la coordination de projets médicosociaux et de recherche.
Depuis combien de temps es-tu impliqué dans la lutte contre le sida ?
Depuis une quinzaine d’années maintenant. J’ai une formation de recherche en virologie sur les vaccins. J’ai d’abord travaillé sur le VIH, puis sur des questions qui avaient plus d’enjeux sociaux. C’est comme cela que je me suis retrouvé impliqué dans des associations, notamment d’auto-support ou de santé communautaire sur les questions de sexe et de drogues chez les gays en temps que personne concernée.
Comment l’aventure avec Solidarité Sida a commencé pour toi ?
La première fois que j’ai eu l’occasion de travailler avec Solidarité Sida, c’était sur « La Nuit du Zapping » à Lyon il y a près de 10 ans. J’ai ensuite eu l’occasion de travailler avec l’équipe Prévention en 2011 sur le projet « Flash test », projet de dépistage d’envergure qui avait mobilisé énormément d’acteurs en Île-de-France. La rencontre avec l’équipe Prévention a été une vraie belle rencontre. Il y a un dynamisme, une énergie très particulière et une alchimie unique chez Solidarité Sida. J’ai eu ensuite l’occasion de revenir parler par exemple de la PrEP ou des autotests lors de formations de vos bénévoles Prévention.
Tu es par ailleurs membre du Comité France, peux-tu nous expliquer de quoi il s’agit ?
Il s’agit d’un comité composé d’experts du VIH au sens large : certains sont spécialisés sur les questions de travail du sexe, d’autres sur l’hébergement, l’accompagnement social, la prise en charge des usagers de drogues ou encore de la santé LGBT. Nous étudions les candidatures reçues dans le cadre de l’Appel à Projets France (54 projets portés par 31 associations ont été soumis cette année) et les instruisons avec l’équipe des Programmes Santé & Solidarité de Solidarité Sida.
Quels sont les types de projets financés par ce comité ?
Ce sont des projets qui répondent à l’urgence sociale dans laquelle se trouvent les personnes séropositives ou exposées au VIH et en situation d’exclusion, puisque comme on le sait, la précarité est un frein à l’accès aux soins. Concrètement, nous finançons des aides directes pour permettre aux malades par exemple de se nourrir et de se déplacer à l’hôpital, ou de mettre à l’abri ceux qui sont dans un état de santé incompatible avec les conditions de vie dans la rue et qui ne sont pas acceptés dans les dispositifs d’hébergement d’urgence, comme les usager.e.s de drogues, les sortants de prison, ou les sans papiers.
Concrètement comment se passe ce comité ?
Avant le comité chaque membre du comité reçoit plusieurs dossiers à étudier. Nous instruisons d’abord chacun de notre côté puis nous délibérons avec un co-instructeur de l’équipe des Programmes Santé & Solidarité. Nous réalisons ensemble une analyse croisée et nous mettons d’accord sur les questions à creuser avec l’association ainsi que sur une proposition de soutien à présenter au comité. Nous nous réunissons ensuite pendant deux jours tous ensemble, pour délibérer. Chaque binôme présente les projets qu’il a étudiés et une décision est prise à la majorité des voix, au regard des conclusions de l’instruction et de l’enveloppe de redistribution disponible, votée par le conseil d’administration. Je suis membre de ce comité depuis 2 ans, c’est donc le troisième comité auquel je participe, bénévolement. Nous avons tous des profils différents et complémentaires, les échanges sont donc particulièrement riches.
Cela doit être compliqué de faire des arbitrages entre les dossiers, non ?
Complètement. Nous nous retrouvons à faire des choix et des arbitrages difficiles, notamment cette année, dans un contexte général tendu pour nos associations partenaires, certaines étant très dépendantes des contrats aidés qui risquent d’être supprimés, d’autres faisant face à un durcissement de la loi relative au séjour pour soins ou à la pénalisation des clients des travailleur.euse.s du sexe, rendant plus compliquées les conditions d’exercice des acteurs de terrain.
Personnellement qu’est-ce que cela t’apporte de participer à ce comité ?
Je suis à la base plutôt spécialiste des questions de santé sexuelle ou d’usage de drogues, mais travailler plus globalement sur la précarité des personnes exposées au VIH est très intéressant. Étudier les dossiers en amont du comité prend du temps, c’est vrai, mais participer à ce comité, c’est aussi l’opportunité de rencontrer des experts qui viennent de différents horizons et que je n’aurais probablement pas rencontrés ailleurs. Après toutes ces années aux côtés de Solidarité Sida, j’ai toujours autant de plaisir à travailler avec vous.