Comme chaque année, Solidarité Sida a convié à Paris des associations partenaires soutenues grâce aux fonds récoltés. Cette année, ils étaient 24 militants venant de 17 associations africaines et de la zone MENA (Middle East and North Africa – Moyen-Orient et Afrique du Nord).

11 pays au total étaient représentés : le Burkina Faso, le Togo, l’Algérie, le Sénégal, le Maroc, la Tunisie, le Cameroun, la République Démocratique du Congo (RDC), le Congo, la Côte d’Ivoire et le Liban.

Quelques jours avant Solidays, Sara de l’association 100% Mamans au Maroc nous a parlé de son association et de ce que lui apporte cette venue.

Bonjour Sara, peux-tu te présenter rapidement ?

Je suis Sara. Je suis responsable de communication à 100% Mamans. Il s’agit d’une association basée à Tanger qui travaille depuis 2006 sur l’amélioration des droits des mères célibataires et de leurs enfants, en faisant du plaidoyer auprès des institutions publiques et de santé, afin de rendre leur dignité à ces femmes et leur permettre d’être considérées comme des citoyennes à part entière.

Concrètement quelle est la situation des mères célibataires au Maroc ?

Concrètement une mère célibataire n’a pas de statut juridique au Maroc. La constitution marocaine ne les reconnaît pas. Elle fait référence aux femmes mariées, aux veuves et aux divorcées mais pas aux mères célibataires, alors que le pourcentage de femmes célibataires au Maroc est en constante augmentation. Une récente étude a montré qu’il y a 100 naissances par jour de mères célibataires dans le pays, pourtant le gouvernement continue de nier leur existence . Par ailleurs, la loi 490 du Code Pénal pénalise les relations sexuelles en dehors du cadre du mariage, et ces femmes risquent donc l’emprisonnement si elles ne sont pas accompagnées par des associations d’un point de vue juridique.

Comment a débuté le partenariat entre Solidarité Sida et 100% Mamans ?

Depuis sa création, 100% Mamans mène des projets de prévention des grossesses non-désirées et des infections sexuellement transmissibles (IST) , en particulier le VIH/sida. Les femmes célibataires sont une population très vulnérable, d’autant plus que la majorité de celles que nous accompagnons  ne sont jamais allées à l’école et que de toute façon, les « cours » de santé sexuelle ne sont pas autorisés au Maroc. Si elles ne font pas la démarche de chercher l’information elles-mêmes, elles n’y auront jamais accès, et cette situation entraîne des prises de risques et des grossesses non désirées, ce qui est le cas de 100% des grossesses des femmes que nous recevons à l’association.

Nous avons aussi développé des actions spécifiques en direction des prostituées (cela ne veut pas dire que toutes les mères célibataires sont des prostituées, mais pour des raisons économiques, un certain nombre d’entre elles survivent grâce au travail du sexe). Grâce au financement de Solidarité Sida, nous avons pu recruter 2 éducatrices de terrain qui font les séances de prévention à l’association, mais aussi à l’extérieur. Sur ce projet, 100% Mamans travaille avec 5 autres catégories que les mères célibataires : les travailleuses du sexe, les usagères de drogues, les jeunes étudiantes, les ouvrières et les femmes vulnérables en général. Nos éducatrices vont à leur rencontre directement sur leurs lieux de travail pour les sensibiliser et distribuer des préservatifs. Nous travaillons aussi sur la réduction des risques avec les usagères de drogues. À Tanger, tout le monde ne connaît pas 100% Mamans et ces séances permettent de créer un climat de confiance et un cadre d’intimité avec ces femmes qui ramènent ensuite à l’association leurs copines ou les femmes qu’elles connaissent. Nous travaillons beaucoup sur le sens de la communauté. Grâce à ce projet financé par Solidarité Sida, nous proposons également un soutien psychologique, des consultations gynécologiques gratuites ainsi que des dépistages et nous orientons vers les autres centres de santé en cas de besoin.

Ce partenariat est d’autant plus important que nous avions depuis 2010 un projet avec le Fonds Mondial qui va s’arrêter, puisque le Fonds Mondial va quitter le Maroc.

C’est la 1ère fois que tu viens à Solidays ?

Oui, c’est la 1ère fois pour moi. L’année dernière, le vice-président (qui est depuis devenu le président) et la coordinatrice du pôle social de notre association étaient venus.

Qu’est-ce que tu attends de ces 3 jours de festival ?

En dehors du festival, venir à Paris est une expérience très très riche car j’ai rencontré un grand nombre de personnes impressionnantes, des vrais militants. Quand les contextes sont diversifiés, tu te dis que tu n’es pas la seule à galérer dans ton pays. C’est un sentiment que l’on a souvent de se dire que les choses se passent mieux ailleurs, mais en fait, en échangeant avec les autres partenaires, je m’aperçois qu’il y a des difficultés quel que soit le contexte. Concernant Solidays, j’ai hâte de découvrir les scènes. Hier, j’ai rencontré des « bénévoles Montage » à Longchamp. Ils sont impressionnants et passionnés, et m’ont donné envie de faire du volontariat ! Je leur ai parlé de mon association, ils m’ont raconté leurs motivations. C’était un moment très riche et j’espère rencontrer encore plus de bénévoles pendant le festival. J’ai également très envie de pouvoir rencontrer les associations qui seront présentes au Village Solidarité.

Quel message tu aurais envie de faire passer aux festivaliers ?

C’est grâce à Solidays que nous travaillons sur ce projet de prévention, très important car il permet d’éviter de nombreuses grossesses non désirées et beaucoup de dégâts pour les mères et les enfants. J’aimerais aussi faire passer ce message à tous les bénévoles qui se sont mobilisés, leur dire que c’est grâce à eux également et à leurs efforts que ce projet existe et que ces femmes bénéficient d’une aide précieuse. Je retiendrai de ce séjour l’esprit de solidarité entre tous les partenaires et avec les permanents de Solidarité Sida. C’est un beau sentiment et j’espère que les festivaliers le ressentiront également.